Massif central

C’est massif et c’est central !

Schistes, granites, roches métamorphiques primaires, bassins de l’ère secondaire, épanchements volcaniques tertiaires et quaternaires dessinent, là, au cœur du pays, des paysages à nul autre pareil. Combien de troupes de campagne, combien de comédiens privilégiés, combien d’artistes vedettes ont-ils emprunté les coches d’eau, les routes empierrées et les voies de chemin de fer pour pénétrer ce relief ciselé, depuis le milieu du siècle des Lumières jusqu’à la Belle Époque ? Car il fallut que l’amour de l’art théâtral et la nécessité de faire bouillir la marmite fussent grands pour encourager ces femmes et ces hommes de spectacle à défier les affres du climat des montagnes du centre et à se frotter aux conditions de voyage longtemps difficiles pour venir s’offrir en représentation dans chacune des villes progressivement équipées en théâtres. Nombreux sont ceux qui ne firent de cet espace qu’une terre artistique de passage : certains la traversent le temps d’une tournée en suivant des itinéraires connus ; d’autres inscrivent leur pratique à la suite de directeurs patentés par les autorités publiques deux ou trois saisons durant tout au plus ; quelques-uns souvent plus talentueux y voient l’occasion d’y briller le temps d’une soirée ou d’une saison d’été. Mais aucun doute à avoir. Le Massif central est historiquement une terre de théâtre : un siècle et demi durant, de 1759 à 1911, plus de 50 villes et villages et plus de 120 lieux ont accueilli des spectacles !

Des pays, un massif

Là où nous voyons aujourd’hui dans le Massif central un espace parfaitement contouré, masse géologique naturelle clairement identifiée, maintes fois reproduite à la pointe du crayon sur des cartes au coin de nos tables d’écoliers, les femmes et les hommes des XVIIIe et XIXe siècles, fussent-ils comédiens professionnels, perçoivent longtemps une juxtaposition de pays, enchâssés dans des provinces particulières. Même si les montagnes, les causses et les vallées leur imposent un défi de chaque instant en tournée, ils traversent avant tout l’Auvergne, le Velay, le Gévaudan, le Tanargue ou le Rouergue, des pays, sans conscience de parcourir une unité supérieure. Le Massif central est pour eux un espace innomé mais un espace vécu, éprouvé. La conscience collective d’un massif, central, n’émerge qu’au cours du XIXe siècle ; ses contours ne s’imposent qu’à partir des années 1870-1890. Ses images de « tête chauve », « de pôle répulsif » et de « château d’eau » ne sont cultivées que depuis l’extrême fin du XIXe siècle. Depuis le Maconnais jusqu’aux monts de Lacaune, entre Vivarais et marches du plateau Limousin, le Massif central devient progressivement le protagoniste incontournable d’une histoire théâtrale au long cours, d’hier à aujourd’hui. Là, découpé entre douze départements : la Loire, l’Allier, le Puy-de-Dôme, la Haute-Loire, le Cantal, l’Ardèche, la Lozère, l’Aveyron, le Lot, la Corrèze, la Creuse et la Haute-Vienne.