Montluçon

Premières représentations au Palais des ducs de Bourbons

En 1770, Montluçon reçoit la visite du comédien-archéologue Beaumesnil à l’occasion d’un périple qui l’emmène de Bourges à Angoulême via La Charité, Nevers, Moulins, Guéret, Uzerche, Tulle et Limoges. Sans doute est-il imité par d’autres comédiens itinérants désireux de profiter de la vogue naissante en faveur du théâtre mais soucieux de ne pas s’aventurer trop en avant à l’intérieur même du Massif central. Montluçon s’impose du reste comme l’une des étapes sur la route comique entre Chalon-sur-Saône et Saintes en Charente-Maritime. Au cours de la Révolution française, c’est au rez-de-chaussée du palais des ducs de Bourbons que les amateurs viennent se divertir et applaudir les artistes de passage, dans une salle à côté de celle réservée aux assemblées municipales ; dans un état douteux et nécessitant parfois des réparations urgentes, le théâtre tourne à plein et accueille différentes troupes de passage, en provenance de Bourges ou de Nevers ; elle attire aussi l’attention d’entrepreneurs de spectacles d’Ussel et de Bordeaux !

Du théâtre dans la chapelle des Ursulines !

En 1809, les magistrats montluçonnais projettent d’établir une nouvelle salle de spectacles dans la chapelle des Ursulines, hier occupée par la société populaire de la ville. L’architecte Hugues Roze-Beauvais, à qui la ville de Vichy devra bientôt, en 1817, le premier abri de la source des Célestins, présente un programme public ambitieux au conseil municipal. Il propose la réhabilitation des bâtiments des Ursules et, autour d’un théâtre et d’une salle de danse, envisage également d’aménager des bureaux tous neufs pour la mairie, des logements pour les gendarmes, le valet de ville et l’instituteur. Il faut pourtant attendre plus de dix ans pour voir le projet de salle de spectacle réellement aboutir. Conformément au souhait de son confrère, l’architecte Lago, habitué des chantiers entre Nièvre et Loire, retient un plan en U s’évasant en forme de lyre. Cette coupe régulière et agréable permet de corriger les effets indésirables liés à la profondeur de l’édifice. Cette quête de régularité est renforcée par l’adoption d’une première galerie en encorbellement suivant le tracé du parterre. Les choix opérés permettent alors de mettre Montluçon au diapason d’autres villes de la région, M. Lago ayant également officié pour les scènes de Bourges, Saint-Étienne et Montbrison. Rattachée de façon quasiment permanente au 12e arrondissement théâtral jusqu’en 1864, Montluçon s’inscrit dans les tournées des artistes privilégiés évoluant principalement entre Bourbonnais et terres berrichonnes.

Du Cirque au Nouveau théâtre…

En 1897, la salle de spectacles dans la chapelle des Ursulines, surnommée « le Vieux Théâtre », est dans un état d’insalubrité et d’insécurité tel que la municipalité en ordonne la destruction. Un premier projet de reconstruction est adopté en 1899 sans succès. C’est à l’occasion d’une manifestation organisée en 1902 en l’honneur des victimes de l’éruption de la montagne Pelée en Martinique que les frères Perrier élèvent un théâtre-cirque en bois à l’emplacement du square Fargin Fayolle au bord du Cher. Provisoire, il devient pendant dix ans le lieu de prédilection des spectacles montluçonnais, accueillant par-delà les artistes professionnels et amateurs des hommes politiques à l’occasion de réunions publiques. Dotée d’une piste circulaire peu adaptée aux traditionnelles scénographies frontales, la salle présente une acoustique catastrophique et il arrive même qu’il y pleuve à l’intérieur, l’étanchéité du toit laissant à désirer. En 1909, l’ancienne chapelle des Ursulines est détruite. Des travaux débutent alors en faveur d’un nouveau théâtre qui ouvre ses portes en janvier 1913. L’inauguration est l’occasion de voir sur scène la Montluçonnaise Gabrielle Robinne – elle est née dans le quartier Ville-Gozet –, actrice réputée de la Comédie-Française où elle est entrée en 1907, invitée par le maire, M. Paul Constans. Le nouveau théâtre offre une façade rythmée par trois baies cintrées décorées à l’origine de vitraux circulaires et surmontées de cartouches portant les inscriptions « Tragédie », « Musique » et « Comédie ». À l’intérieur, la salle à l’italienne présente un plafond parcouru de guirlandes florales. Les couleurs bleu et or courent depuis le rideau de scène jusqu’à la salle, comme au XVIIIe siècle dans de nombreuses salles du pays, à Nantes ou Bordeaux… jusqu’à ce que rouge pompéien ne vienne les supplanter après les travaux de 1968.